Nadja Peter Steiner, un retour à Mila l'heure (1/2)
À St-Gall, Nadja Peter Steiner et Mila ont crevé l’écran. Double sans-faute dans la Coupe des Nations et à une touchette de la victoire dans le Grand Prix de Suisse (8es), les deux complices ont fait forte impression ce qui leur a permis de décrocher leur sésame pour les championnats d’Europe de La Corogne. Médaillée de bronze par équipe aux Européens de Göteborg en 2017 avec Saura de Fondcombe, la Suissesse à l’équitation fine et légère a fait un retour tonitruant avec la veste rouge. Originaire de Rüti/ZH, Nadja Peter Steiner a grandi dans le canton de Schwytz, au bord du lac de Zurich. Après avoir fait ses armes chez les jeunes, elle se fait sa place au sein de l’élite jusqu’à atteindre les 5* avec l’atypique Céleste IV et le puissant Capuera II, puis les grands championnats avec son attachante alezane Saura de Fondcombe (par Balou du Rouet). Tenue à l’écart des terrains de concours durant une longue période, la cavalière de 40 ans, qui vit en France depuis plus de 15 ans et maîtrise parfaitement la langue de Molière, a ensuite entamé une période de reconstruction avant d’accueillir l’exceptionnelle Mila, monture n°1 de Ludger Beerbaum, puis de l’Irlandais Eoin McMahon, début janvier. Rencontre au CSIO de St-Gall, terre de son grand retour.
Nadja, commençons par revenir sur votre magnifique CSIO de St-Gall, comment avez-vous vécu ces moments ?
C’était un sentiment incroyable. J’ai récupéré Mila il n’y a pas très longtemps, on se connaît à peine, mais on s’entend déjà très bien. C'était génial ! Quand on entre en piste, on est un peu dans une bulle, on est concentré sur le parcours, mais après, on sent tout le soutien du public, ça fait chaud au cœur. Dans le GP, Mila a tout simplement été incroyable une nouvelle fois !
Quel fut votre sentiment en retrouvant vos coéquipiers après tout ce temps ?
Ça m’a fait énormément plaisir de recourir avec eux, surtout Steve (Guerdat) et Martin (Fuchs) qui faisaient déjà partie de l’équipe à l’époque. C'était très sympa. Je n’avais pas encore monté avec Edouard (Schmitz), même si on se connaissait des concours. Ça fait plaisir qu’il y ait de nouvelles têtes et que d’autres soient toujours là.
Formée par Ludger Beerbaum (elle fut d’ailleurs la dernière monture du Kaiser qui avait mis un terme à sa carrière après le GP d’Aix-la-Chapelle 2023, conclu avec 4 pts) puis vice-championne d’Europe par équipe à Milan avec Eoin McMahon, Mila (par Monte Bellini) a certes beaucoup d’expérience, mais comment êtes-vous parvenue à faire la paire si rapidement ?
Je n’ai pas vraiment d’explication. On s'est bien entendues dès le premier jour et on est devenu un couple assez rapidement. C'est une jument incroyable, c'est un plaisir de la monter. Quand nous sommes arrivés au concours à Dubaï début janvier, Mila était sur place parmi mes autres chevaux. Ma maman m’avait fait la surprise. C'est Philipp Weishaupt qui m'a tout expliqué (Ludger Beerbaum et la groom de Mila avaient aussi fait le trajet, ndlr).
Quel est son caractère ?
C’est la plus gentille jument que l’on puisse imaginer, c'est un amour. Elle est très câline. Je pense qu'elle a très peu de défauts.
Quid de vos autres chevaux et notamment de No Comment de Septon ?
C'est un super chouette cheval ! Il a un style complètement différent de Mila, mais il a envie de bien faire. Il est un peu plus précieux et il peut parfois monter en pression, c'est un mec (rires). Il a fait beaucoup de concours dans sa vie,mais n'a pas encore énormément d'expérience au niveau 5*, il a débuté à ce niveau l’année dernière. C’est mon seul étalon au milieu de cinq juments, c’est très pratique (rires).
Parlez-nous aussi de Nice van’t Zorgvliet (3e et 6e en 150 à La Baule et à St-Gall, 2e en 145 à Nancy) et de vos deux juments de 9 ans, Tailormade Fia Conthara et Quarantinette vh Hazelarenhoekje.
Nice est très régulière. Elle a déjà sauté de grosses épreuves par le passé, mais je ne l'ai pas encore lancée dans un Grand Prix 5*, elle a juste fait une 160 à Rome (au Circo Massimo, ndlr) l’an dernier lors de notre troisième concours ensemble (entre temps, la jument a gagné une 160 à Monaco le week-end dernier, ndlr). Les deux 9 ans sont un peu plus « bébés », elles sont encore un peu vertes pour leur âge, on essaie de les faire tourner à côté des chevaux de tête et on espère que par la suite, elles pourront prendre la relève.
Les championnats d'Europe, était-ce votre but ?
Ce n'était pas du tout mon objectif cette année parce qu'on se connaît encore très peu avec Mila. Ni même de monter une Coupe de Nations. Finalement, ça s'est passé bien plus vite que je pensais, alors pourquoi pas ? De toute manière, on ne peut jamais dire non à un championnat. Monter un championnat procure une adrénaline qu'on ne connaît à aucun autre moment, à part dans les Coupes. C'est autre chose que de monter pour soi-même, ce sont des émotions que l’on ne vit pas tous les jours.
Si on revient au début de votre parcours, comment en êtes-vous venue aux chevaux ?
Un peu par hasard. Ma maman a toujours un peu monté, mais jamais professionnellement. J’ai toutefois commencé assez tard parce que quand j'étais petite, j'aimais bien les chevaux mais je n'avais pas trop envie de monter dessus.
Vous avez fait le circuit de la relève, sans championnat d’Europe, mais avec des médailles aux championnats de Suisse.
Oui, j’ai eu les trois couleurs de médailles et on a fini avec la meilleure, l’or avec ma petite jument de cœur Flower. C'était il y a longtemps déjà, on a presque oublié (rires).
Qu'est-ce qui vous a décidé à devenir professionnelle ?
Ce n'était pas vraiment une décision. Pendant mes années juniors et jeunes cav’, je me suis entraînée avec Lars Nieberg (cavalier du mythique For Pleasure et d’Esprit FRH, l’Allemand fut double champion olympique, champion du monde et d’Europe par équipe, ndlr). D'ailleurs, les dernières années, j'étais basée chez lui. Après la relève, on a continué sur un beau niveau de concours.
Qu’est-ce que Lars Nieberg vous a apporté ?
Au final, il fut mon seul entraîneur, car depuis je travaille seule. C’est donc à lui que je dois toutes mes bases.
Et votre équitation, à l’américaine, légère et dans le galop, d’où vous vient-elle ?
Pas de Lars, même s’il montait toujours avec le sens de l’équilibre. Je pense que c’est surtout grâce à Céleste. Elle était extrêmement sensible. Elle ne supportait aucun mouvement du cava- lier, ni que l’on s’assoit dans la selle. Je me suis habituée donc à monter comme ça et ça fonctionne avec les autres chevaux.
Elisa Oltra
La deuxième partie de cette interview sera en ligne demain.
Cet article a été publié en p. 6-9 du Cavalier Romand de juillet. Toute reproduction des textes et photos, même partielle, est interdite sans l’autorisation de l’éditeur.