Philippe Putallaz : « Je suis privilégié »
À Planfayon, au pied du Lac Noir, au terme d’un championnat de saut d’obstacles élite palpitant, avec deux barrages pour les médailles, Philippe Putallaz, plus crocheur que jamais à l’âge de la retraite, a remporté son quatrième titre romand devant un autre Valaisan, Martin Kühnis et le Vaudois Mehdi Roessli- Dobjanschi. Interview.
Philippe, que représente ce quatrième titre pour vous ?
J'ai été trois fois champion, cinq ou six fois 2e, j'ai participé à plein de finales, mais celui-ci est vraiment beau car j’ai 65 ans, je suis retraité, et j'ai encore la chance de monter pour une écurie exceptionnelle, celle de Maurice Dabbah.
J’ai aussi deux grooms extraordinaires. Je ne m’entraîne pratiquement pas, donc je suis chanceux de pouvoir compter sur cette équipe. Et cela montre aux jeunes que l’on peut encore rêver à mon âge ! Mon fils a 36 ans et rêve toujours de faire du sport, mais il a dû lever le pied pour gagner sa vie. Ça lui prouve qu’on peut arrêter temporairement, puis espérer reprendre avec succès, si tu es bon cavalier, que tu sais t'entraîner et que tu fais des efforts pour rester en santé. Peu de gens le savent, mais je fais beaucoup de musculation, je nage et je fais du vélo, ça ne tombe pas comme ça sans effort et en claquant des doigts. Le talent ne suffit pas. Je monte peu à la maison, mais je saute trois ou quatre chevaux par semaine et j’ai fait une vraie saison de concours. Et je fais des efforts au niveau de la nourriture, sinon on devient gros. Je ne suis pas maigre, loin de là, mais je suis prêt physiquement et mon dos va bien, la musculation a changé ma vie.
On sent l’émotion dans votre voix. Il n’y a donc pas de lassitude, après toutes ces saisons de concours ?
Non parce que j’estime être privilégié de donner une interview à 65 ans un dimanche après-midi, plutôt que d'aller taper le carton et boire un coup de rouge au bistrot. Je sais que je suis détesté, mais depuis que l’épreuve est finie, mon téléphone ne fait que de sonner. Je suis nature, je suis comme je suis, j'ai une grande gueule que j’assume complètement, mais, j’ai montré qu'avec de l'entraînement et une bonne équipe, on peut gagner. On n'est pas obligé d'avoir 25 ans et d’être riche, même si, et j’y tiens, ça reste un sport de privilégiés, il ne faut pas l’oublier.
Vous avez beaucoup rendu hommage à votre cheval Django’s Time. Quelle est son histoire ?
Django faisait du concours complet avant d’être mis en vente chez Cyril Bouvard, qui a fait une ou deux 140-145 avec lui. J'ai envoyé mon propriétaire l'essayer, il est revenu, m'a dit qu’il avait monté un crack et l'a acheté directement. Cette année, lors de la première 140 de la saison à Uster, j'ai fait six fautes, mais j’ai aussi eu ce sentiment et j'ai tout changé, j'ai enlevé le Pelham, la martingale et les éperons. Et depuis on a progressé. Django a fait tous les Grands Prix cette année à 4 ou 8 pts maximum et nous étions 5es à Sion. Nous sommes arrivés à Planfayon sur la pente ascendante.
Résultat des courses, le titre romand reste en Valais.
Oui, vraiment. Je ne le mets pas à Genève !
Que peut-on vous souhaiter encore ?
La santé, c’est le plus important.
Elisa Oltra
Cet article est paru en p. 23 du numéro de novembre. Toute reproduction des textes et photos, même partielle, est interdite sans l’autorisation de l’éditeur.











