À Strzegom, l'apprenti du Chalet-à-Gobet a fait une belle remontée après le dressage à l'occasion de ses premiers championnats d'Europe. © equito.pl À Strzegom, l'apprenti du Chalet-à-Gobet a fait une belle remontée après le dressage à l'occasion de ses premiers championnats d'Europe avec Hi Spec. © equito.pl

Camille Weiss rêve de veste rouge

Né à Neuchâtel d’une maman allemande et d’un papa suisse, Camille Lasse Weiss, 17 ans, est l’un des (très) rares Romands à avoir pris part à une échéance européenne en concours complet avec la relève. Le dernier en date n’étant autre que Robin Godel, en 2017 aux Européens juniors avec Grandeur de Lully CH. Vice- champion de Suisse des « moins de 21 ans », l’apprenti du Chalet- à-Gobet s’est placé 25e sur 64 des Européens de la relève à Strzegom en Pologne. Derrière son air malicieux et rêveur, le cavalier de Nods, au pied du Chasseral dans le Jura bernois, n’en est pas moins réfléchi et téméraire. Rencontre.

Camille, comment as-tu commencé à monter à cheval ?
J'ai débuté parce que ma maman montait. On allait faire des camps en Allemagne, où l’on faisait notamment de la voltige, avec elle et mon grand frère. Lui fait désormais du cliff jumping (saut depuis une falaise), mais moi j’ai croché. J’ai ensuite participé chaque année à des stages en France au poney-club de Laizé, en Bourgogne. J’ai fait mon Galop 2 et mon premier concours complet à 9 ans à la fin d’un stage.

C’est là que tu as eu le déclic ?
Oui, à 9 ans ! J’ai continué jusqu’au Galop 5 en montant des poneys de là-bas. Nous habitions en Suisse, mais nous y retournions chaque année pour les stages. En parallèle, je montais à Lignières/NE, à l’élevage des Baumes. En France, on m’a confié des poneys et notamment Athéa avec laquelle j’ai pu faire les champion- nats de France de complet. J’allais la monter le week-end, c’était presque 4 heures de route.

Puis, tu es revenu en Suisse.
À la fin des vacances d’été 2023, Jean-Jacques Fünfschilling m'a proposé sa jument Nobstar de Lully CH. J'ai pu faire la licence, le B2 à Berne et intégrer le groupe des cadres régionaux. J’ai ensuite malheureusement dû rendre la jument à M. Fünfschilling. Nous n’avions pas les moyens de l’acheter et je me suis donc retrouvé à pied.

C’est à ce moment-là que tu rencontres CSF Hi Spec ?
En effet. Après avoir fait les championnats d’Europe juniors en 2023 (avec Sara Rüdisühli, ndlr), Hi Spec n’avait plus de cavalier. Pierrette Glutz, la sponsor de l'ancienne propriétaire, a racheté le cheval et elle me la confié. Elle me soutient avec plaisir et toujours avec le sourire !

Comment as-tu atterri au Chalet-à-Gobet ?
J’ai fait ma scolarité dans le canton de Berne, puis j’ai commencé l’apprentissage de profes- sionnel du cheval en monte classique au CEN de Berne, où je suis resté un an et demi. On a ensuite constaté avec la propriétaire de Hi Spec que ça ferait plus de sens, particulièrement en ce qui concerne ma carrière sportive, de continuer au Chalet avec Benoît Johner, qui est aussi l’entraîneur de l’équipe junior, et l'olym- pique Mélody Johner. J’ai donc commencé en février 2025.

Quels sont tes plans pour la suite ?
Si possible, aller en Angleterre et continuer dans ce métier. C’est l’endroit idéal. Via Andrew Nicholson (l’entraîneur de l’équipe de Suisse élite, ndlr), on pourrait avoir de bonnes adresses, si ce n’est pas chez lui.

Qu’est-ce qui te plaît dans le complet ? 
L'adrénaline du cross. J'ai commencé l'équitation à 7 ans avec le dressage. Après, à partir de 9 ans, j’ai continué avec le saut, c'est ce qui m'a plu dès le début. Le complet me permet de mélanger deux disciplines que j’aime beaucoup. J’ai dû me faire au dressage, mais je dois dire que plus j'avance, plus ça me plaît. Ça nous demande toutefois plus d'entraînement à Hi Spec et à moi, ce n'est pas notre discipline phare.

Comment as-tu appréhendé tes premiers championnats d’Europe ?
J’y suis allé sans stress. Je suis assez calme en général, et je le voyais comme un moyen de me mettre en avant.

Raconte-nous cette aventure...
Nous avons roulé jusque là-bas avec mes parents. Sur place, Benoît Johner, Claudia Dietrich (cheffe d’équipe), Pierrette Glutz et la vétérinaire Antonia Müller nous ont rejoint ; ça faisait beaucoup de monde pour moi et j’ai eu peur de les décevoir. J’aurais pu faire mieux au dressage : c’était le même programme qu’à Avenches, où nous avions obtenu 65%, et là avec le stress, nous avons eu 59%. Le cross, je l’ai marché jusqu’à en avoir marre. On a fait un parcours sans faute, juste avec 5 pts de temps car on a soigné les abords. À ce moment-là, je suis remonté de 27 places ! J’ai massé le cheval, on a tout fait pour qu’il récupère au mieux et le lendemain au saut, le parcours était également sans faute. Je retire vraiment du positif de cette expérience.

Parle-nous de ton cheval CSF Hi Spec ? 
C’est le parfait maître d’école. Sur le cross, il m’a tout de suite plu. Il est assez introverti, mais fait tout ce qu’on lui propose avec grand plaisir. Il ne montre pas beaucoup ses émotions, mais je pense que ça fait de lui un cheval très attachant car il faut créer une relation avec lui.

Justement, à quel point cette relation est-elle importante ?
Elle est importante dans toutes les disciplines, mais dans le cross, on doit connaître et comprendre notre cheval plus que tout. Il faut qu'il ait une grande galopade, mais aussi qu'il soit là pour nous, et qu’il ne doute pas. C’est grâce à cette connexion que lorsqu’une distance vient moins bien, il va essayer de donner tout son possible pour nous. Surtout que ça devient gros !

As-tu déjà eu de l'appréhension sur un cross ?
Non. À Avenches, j'ai trouvé le cross bien construit et abordable pour moi. Mais je n'ai jamais été autant stressé, parce que je voulais faire un bon résultat à ce championnat de Suisse. J’ai cependant gardé ce stress pour moi afin que mon cheval ne le ressente pas.

Qu’aimes-tu faire quand tu as un peu de temps libre ?
J'aime aller faire du cliff jumping avec mon frère, mais pas de trop haut. J'ai fait une semaine de vacances, pour la première fois depuis un an et demi, sans cheval, avec mon frère et un ami. On a fait un road trip en France et sauté des falaises de partout. Ils participaient à une grande compétition et je suis allé regarder. L'ambiance est fun et on a pu rencontrer des athlètes qui vivent de cela, c’était très intéressant.

Quels sont tes objectifs et tes rêves ?
Les championnats de Suisse et d'Europe juniors 2026. L’autre but sera de garder ma place dans l’équipe nationale en trouvant des sponsors voulant bien m’aider car Hi Spec a déjà 17 ans et approche d’une retraite bien méritée. Mon rêve, c'est de rester dans l'équipe le plus longtemps possible et de perdurer dans ce métier-là en étant le plus possible en connexion avec l'animal. Le rêve ultime, ce sont les Jeux olympiques. Former un cheval jusqu'au haut niveau me plairait bien.

Sans gros moyens financiers, penses-tu que c'est quand même possible ?
Il y a deux ans, quand j'ai su qu'on devait rendre Nobstar, j'ai pleuré, parce que je n'avais plus rien. Pour moi tout s'effondrait alors que ce n’était que le début de l’aventure en Suisse. On savait qu'on ne pourrait pas acheter de prochain cheval et le leasing ne se fait pas trop chez nous. Par chance, on a rapidement eu l’opportunité avec Hi Spec. Mélody le dit souvent, parfois les planètes s'alignent. Et par chance, j'étais là au bon moment.

Du haut de tes 17 ans, en côtoyant notamment les Johner et en voyant tout ce que ça demande, ça ne te fait pas peur ?
Monter et former tous ces chevaux, je trouve cela exemplaire. Et encore plus avec des chevaux de leur propre élevage. On doit être fier de pouvoir vivre de cette passion. C'est pour ça que j'ai continué mon apprentissage ici et je les remercie beaucoup de m'avoir pris.

Le mot de la fin ?
Un grand merci à Benoît, Mélody, Pierrette, Swiss Equestrian, Claudia, ma famille et toutes les personnes qui me soutiennent dans cette aventure. 

Propos recueillis par Elisa Oltra et Lena Vulliamy

Cet article est paru en p. 30-31 du numéro de novembre. Toute reproduction des textes et photos, même partielle, est interdite sans l’autorisation de l’éditeur.


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