Philippe Guerdat sera le chef de l'équipe de France

Le Jurassien quitte les Belges, à la demande insistante des cavaliers tricolores. Un beau défi!

Philippe Guerdat en compagnie de son fils Steve et du cavalier français Roger-Yves Bost Philippe Guerdat en compagnie de son fils Steve et du cavalier français Roger-Yves Bost ©Dirk Caremans

Il avait décidé de repartir pour un mandat avec les cavaliers belges, qui l'apprécient beaucoup, mais devant l'insistance des Français, qui lui tournaient autour depuis le rendez-vous manqué aux JO de Londres et redoublaient d'intensité ces derniers temps (on l'avait bien vu à Bâle et surtout à Zurich), il a fini par céder, tenté par un aussi beau défi: Philippe Guerdat (photo) sera le chef de l'équipe de France de saut d'obstacles et le sélectionneur en vue des prochains Jeux mondiaux de 2014 en Normandie et des JO de Rio de Janeiro 2016. Un sacré défi, effectivement!

Le père du champion olympique individuel 2012 poursuit ainsi l'un des plus beaux parcours d'entraîneurs jamais accompli. Qui, hormis peut-être son prédecesseur à la tête des Bleu Henk Nooren, qui avait aussi coaché les Italiens, les Espagnols et les Suédois, aura été aussi demandé à l'étranger? 

La nouvelle ne sera officielle que ce soir, le comité fédéral de la Fédération française d'équitation (FFE) étant réuni ce mardi depuis midi, mais on peut déjà l'annoncer puisque la Fédération royale belge des sports équestres (FRBSE) l'a fait ce matin sur son site: Philippe Guerdat quitte bel et bien la Belgique pour la France.

"Philippe Guerdat a décidé de rompre son contrat avec la Fédération belge, malgré la promesse de conduire l’équipe jusqu’aux championnats du monde, à Caen en 2014. L’appel d’un nouveau challenge a été le plus fort.  Il a décidé de rejoindre la Fédération française, souhaitons-lui bonne chance dans ses nouveaux objectifs, en espérant qu’il ne regrettera pas l’amitié et la confiance que lui portait l’entièreté des cavaliers internationaux belges", déclare Eugène Mathy, président de la commission d’obstacles de la FRBSE, qui cherche désormais activement un nouveau chef d’équipe (avec l'aide de Philippe Guerdat, du reste!). Et Eugène Mathy d'ajouter sur le site belge lequimag.be.: "Nous ne pouvions pas nous aligner sur le salaire proposé par la France, ni sur la qualité de l'équipe qu'il aura sous ses ordres".

Un nouveau défi donc pour Philippe Guerdat, qui fut le héros du... Grand Prix de France 1988 à Dinard (il y avait battu MM. Skelton, Whitaker, Durand et cie au barrage...), deux fois médaillé européen (1985 à Dinard (déjà!) et '87 à St Gall) et deux fois sélectionné olympique (5e par équipe en 1984 et 7e en '88) comme cavalier avant de mettre le pied à l'étrier de son fils Steve, multi-médaillé et en or l'été dernier à Londres, est un entraîneur parmi les plus réputés. Il a longtemps dirigé les juniors et jeunes cavaliers suisses avant de reprendre l'équipe d'Espagne (relève et élite), celle d'Ukraine, de Russie et enfin de Belgique, depuis fin 2009.

L'hommage des cavaliers belges
Grâce à lui, à son engagement total, les Belges étaient immédiatement remontés en Super Ligue et ils avaient décroché l'or (Philippe Le Jeune) et le bronze (lpar équipe) aux Jeux mondiaux 2010 de Lexington (Kentucky). Les résultats avaient été moins spectaculaires par la suite, mais les cavaliers, qui lui avaient même offert une voiture en cadeau, le respectent et l'admirent beaucoup. Ainsi le champion de Belgique Jérome Guéry sur le très apprécié site studforlife: "Je suis triste parce qu’on avait construit quelque chose, il y avait un esprit d’équipe qui s’était formé comme je n’avais jamais connu auparavant. Maintenant, j’espère que comme il nous l’a promis au téléphone, il ne va pas nous laisser tomber. Il m’a dit qu’il allait faire en sorte qu’on ait quelqu’un qui pourra prendre la relève dans le même état d’esprit que lui. J’ai aussi des craintes par rapport à ça car en Belgique, ce n’est pas facile comme dans tout pays mais il y a des gens très puissants et si ces gens-là prennent le contrôle : il n’y aura plus beaucoup de places pour d’autres cavaliers. J’espère donc vraiment que la personne qui va prendre le relais va être dans le même état d’esprit et pensera au sport avant tout. Je suis content d’avoir pu monter pendant son mandat. Je retiens qu’il a changé pas mal de choses dans la mentalité des cavaliers belges, il a vraiment réinstauré un esprit d’équipe. J’espère qu’il restera quand même un peu à nos côtés et que la Belgique restera une nation soudée au moins sportivement comme c’était le cas avec lui et que l’on pourra faire des Coupes des Nations comme l’an dernier, avec des Wallons, des Flamands et un bon état d’esprit. »

Ou encore Grégory Wathelet, toujours sur studforlife : « Pour moi et pour tout le monde, il a fait tellement de bonnes choses, tellement de choses positives qui a amélioré l’équipe belge en général à tout point de vue. Pas seulement au niveau des sélections mais avec pleins de petites idées qu’il a amenés pendant qu’il était là que cela ne peut être que positif. Je comprends tout à fait sa décision, évidemment, il m’en avait parlé. Je ne peux pas être déçu de lui, c’est quelqu’un de bien. Je ne perds pas un ami, on a juste perdu un bon sélectionneur. Maintenant tous les cavaliers doivent être déçu à part les quelques-uns que ça dérangeait qu’il soit juste, comme les Philippaerts, il ne faut pas avoir peur de le dire. 90% des cavaliers vont dire que c’est une perte. Maintenant, je comprends qu’il devait faire un choix, que ce n’était pas un choix facile mais à la fin, il faut voir un peu aussi pour soi-même. Après, tout va dépendre de la personne que l’on va mettre en place."

"C'est un homme formidable, droit et honnête", souligne le champion du monde Philippe Le Jeune, qui regrette son départ. "C'est un vrai plus pour la France, il va donner leur chance aux jeunes, à davantage de couples, comme il l’a fait en Belgique, où il voulait faire tourner tout le monde. Il très fort techniquement et sait sélectionner les bons couples pour les Coupes des Nations. C'est un véritable homme de cheval et, techniquement, il était d’une aide très précieuse en concours."


Sept mois de tergiversations en France
Comme vous le savez, la France tergiversait depuis des mois quant au choix de son nouveau chef d'équipe. La récente démission du Néerlandais Henk Nooren semblait avoir facilité la transition, mais tous les papables cités (Bonneau, Caron, Prudent, Levallois, Pomel, Bourdy et cie) avaient renoncé... quand ils n'avaient pas été écartés. Et beaucoup commençaient à s'énerver contre la Fédération, à l'instar de l'ancien médaillé olympique Hervé Godignon et de 5'000 "indignés de la Fédération".
Même s'il peut compter sur le soutien total de la plupart des cavaliers, comme Pénélope Leprévost, Michel Robert ou Kevin Staut, Philippe Guerdat reconnaît qu'il s'agit là d'un défi compliqué, mais passionnant: "J’ai 60 ans, j’ai commencé à m’occuper des juniors et des jeunes cavaliers suisses, puis de quatre équipes nationales, en Belgique j’ai passé trois saisons formidables et j'ai noué des liens incroyables avec plein de gens, mais je suis face à un challenge: entraîner la France, une des plus grandes équipes au monde. Ce défi me passionne et c’est une sorte d’aboutissement". Il semble que les cavaliers tricolores  se réjouissent aussi de cette nouvelle alliance franco-suisse, misant sur ce motivateur et fédérateur hors-du-commun.
Alban Poudret


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