Sortie cinéma : Un film sur le cheval de Bartabas

Bartabas Bartabas

Ce mercredi sort le film « Le Caravage » d’Alain Cavalier. Le cinéaste français a filmé durant trois années le travail matinal de Bartabas avec son cheval fétiche « le Caravage ». Si le film est déjà sorti sur les écrans le 28 octobre, c’est ce mercredi 2 décembre qu’il fait son entrée dans les salles obscures en Suisse Romande.

Alain Cavalier explique sa démarche :

J’aimais beaucoup, tôt le matin, prendre le métro à la Porte de Saint-Cloud pour me rendre au Fort d’Aubervilliers, siège du théâtre équestre Zingaro.

À l’écurie, je disais « Bonjour » à la palefrenière et je la filmais qui brossait, tressait, sellait un cheval harmonieux et de haute taille nommé Le Caravage. Elle le conduisait au manège. Bartabas, grand écuyer, apparaissait. Je lui disais « Bonjour », ce qui était ma deuxième parole.

Pendant une demi-heure, sans échanger un mot, j’étais admis à la cérémonie intime qu’est le travail de Bartabas avec Le Caravage sur les figures équestres codées ou inventées. J’étais témoin d’une conversation silencieuse entre deux corps, dont l’un pèse huit cents kilos.

En fin de séance, je disais « Merci » à Bartabas. Je suivais la palefrenière jusqu’à l’écurie où elle était aux petits soins pour Le Caravage. Un autre « Merci » vers elle avant de retourner au métro. J’avais prononcé quatre mots. Plus n’était pas nécessaire pour tisser le lien entre l’écuyer, le cheval et le filmeur.

Le duo Bartabas – Le Caravage, j’ai ramé avant de le filmer correctement. Il est fait de rythmes et mélodies musculaires qu’il faut capter à la seconde. J’étais jaloux de l’aisance de Bartabas sur sa monture, j’étais navré de mes mains pataudes sur ma caméra.

Je me suis entêté. Bartabas m’a aidé ; il ne s’alarmait pas quand il me voyait douter qu’un film puisse sortir de tout ça.

Le bonheur est qu’au fil d’une très longue traversée de temps, je suis tombé amoureux de ce cheval merveilleux pendant cette grave maladie où il perdit cent kilos.

Plus tard, la preuve royale d’un échange d’amour m’a été donnée, un matin. Ébahi, heureux, je l’ai filmée ; elle vous est montrée dans le film. Le Caravage partait régulièrement en tournée dans les grandes capitales du monde. Il s’illustrait dans les spectacles orchestrés par Bartabas et pendant ce temps là, je l’attendais à Paris.

J’ai eu la tentation d’introduire l’image de ma mère et du cheval Bijou que son père lui avait offert, enfant. Elle en parlait encore avant sa mort à cent deux ans. Je voulais suggérer cette époque où le cheval-moteur commençait à couper les attaches si anciennes entre l’homme et son partenaire de plaisir, de labeur et de guerre. Il aurait fallu des mots, encore des mots... alors que Bartabas et Le Caravage n’échangent que des respirations, des pressions, des bruits de bouche qui sont messages subtils et toujours bien reçus. Y a-t-il, là, une couleur érotique ? Un zeste de mystique ? Si vous le désirez, c’est possible. En tout cas, chez Bartabas, il y a un goût de s’approcher d’une certaine perfection dans l’harmonie des corps qui entraîne joie de l’esprit.

À la fin d’une séance, quand Bartabas met pied à terre et que le cheval fume de la chaleur de l’effort, une tranquille fatigue, un accord serein les unissent et les relient à tout.

Ce grand manège du Fort d’Aubervilliers, hangar à l’architecture informe, devient une sorte de temple du matin calme. Ça ne dure pas, mais c’est bon à vivre.

Aujourd’hui, j’y vais encore filmer pour le plaisir. Après les exercices, je rejoins Bartabas dans sa caravane rangée tout contre son superbe théâtre en bois. Nous buvons un café et les deux amis sont de sacrés bavards. Alain Cavalier

 


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