Construire pour l'avenir aux Verdets
Un peu plus d’un an après le début de leur collaboration, Gaëtan Joliat, Olivier et Sarah de Coulon tirent le bilan d’une saison exceptionnelle avec des classements du premier en Grands Prix 5*, la victoire dans la Coupe des Nations 4* d’Avenches, des succès sur le circuit européen de l’EEF ainsi qu’une médaille d’argent au championnat de Suisse élite, entre autres. Cela grâce à une vision du sport et des objectifs communs. À St-Blaise, sur les hauts de Neuchâtel, l’équilibre semble tout trouvé entre l’un des mécènes les plus influents du pays et l’un des jeunes cavaliers les plus prometteurs de l’équipe de Suisse.
Lorsqu'on demande à Olivier de Coulon pourquoi il a choisi Gaëtan Joliat comme cavalier, la réponse fuse : « Vous en connaissez d’autres des comme ça ? » Vrai que le choix s’imposait presque comme une évidence, surtout si l’on se penche sur l’historique des Écuries les Verdets qui ont travaillé durant sept ans avec Bryan Balsiger, lui aussi jeune cavalier à l’époque. Au terme de la collaboration avec le Neuchâtelois, c’est Pius Schwizer qui montera les chevaux une année durant. « Pius est un pilote incroyable, mais nous divergions dans notre manière de penser et de concevoir le sport. Nous avons appris de cette expérience », explique Sarah de Coulon.
Ainsi, le duo père-fille se tourne vers Gaëtan Joliat (âgé alors de 19 ans), dont le profil colle parfaitement à la philosophie des Verdets. « Notre but a toujours été d’acquérir des jeunes chevaux et de les faire progresser dans le respect, en les écoutant et en leur laissant le temps de grandir. Avec Gaëtan, nous retrouvions aussi un coach, Thomas Balsiger, qui est dans la même optique. »
Grandir et faire grandir
Cette manière de travailler n’est pas le fruit du hasard car elle a permis par le passé à des chevaux, disons-le clairement, plus atypiques ou qui ne crevaient pas l’écran, de collecter de fantastiques succès. On pense bien sûr à Clouzot de Lassus, Ak’s Courage, Dubaï du Bois Pinchet ou, plus récemment, au très sensible Chelsea Z. « Clouzot a tout fait avec son cœur, il grandissait de 10 cm en entrant en piste et il donnait tout », se remémore Olivier de Coulon. « On s’est rendu compte qu’en fonctionnant ainsi, les chevaux nous donnaient beaucoup, pas grâce à leurs capacités, mais avec leur cœur. »
Passionné de sport à adrénaline, de la moto au ski en passant par le dragster, il n’était pas question pour le discret Neuchâtelois de réduire au fil du temps son engagement dans les sports équestres : « J’aime construire et faire progresser. J’ai toujours estimé qu’il ne servait à rien d’acheter des chevaux à 2 ou 3 millions, qu’il suffisait d’avoir le coup de cœur. Et je ne regarde jamais les origines, celles de nos chevaux, je ne les connais même pas d’ailleurs ! Et puis la passion et l’envie de défis sont toujours là. »
Depuis quelques mois, c’est sa fille Sarah, qui a fait ses études puis travaillé dans les banques à Genève, qui a pris le relais dans la gestion des écuries et notamment la partie administrative. « À partir d’un certain temps, j’estime qu’on a le droit de n’avoir que le côté plaisir. Je fais tourner la maison et mon papa le concours. Et c’est toujours lui qui conduit le camion, Gaëtan attend patiemment (rires) », explique celle qui a elle-même monté jusqu’au plus haut niveau national et au CHI de Genève.
Former la relève
Les deux locomotives des Écuries les Verdets, ce sont bien sûr Chelsea Z et Just Special VK. Sans faute sur les barres à St-Gall (2 pts), le premier contribuait aux excellents résultats de l’équipe de Suisse sur le circuit européen de l’EEF avec une 2e place à Gorla Minore (4+0), la victoire au barrage à Samorin et à Avenches. À ceci s’ajoutait la 10e place aux Européens -21 de Riesenbeck. Quant à la vice-championne de Suisse élite Just Special VK, elle était classée dans les Grands Prix 5* de Gassin et d’Oslo. Pour les épauler, le Jurassien peut compter sur le retour de l’excellente Scarlina de Tiji Z, qui a déjà classé un GP 5* à La Baule, mais aussi les étalons Fabregas S (10 ans) et Qupido H (9 ans), ainsi que sur Keep Cool (9 ans). « Scarlina est un phénomène. Qupido montre tellement de belles choses. Il est très puissant, ce n’est pas simple, mais il apprend quelque chose à chaque sortie. Et sur Keep Cool, le sentiment est exceptionnel », détaille leur pilote.
Parmi les plus jeunes, les deux juments de l’élevage suisse de la Mire Chikita (7 ans) et Kaotina (5 ans) sont venues compléter l’effectif : « Je suis aussi impatient d’aller faire des Promotion le mardi que de faire un 4*. C’est très différent, mais on reste dans le même but, construire. » Au total, ce sont treize chevaux dont s’occupent Mélusine Guiblin-Miché, groom concours aux Verdets depuis plus de dix ans, Florian Latil et Valentine Mattei, grooms et cavaliers-maison, et Kerim Paqarizi, palfrenier-soigneur.
À Genève, accompagnés de Qupido H, Chelsea Z et Just Special seront bien sûr de la partie. Avec cette dernière, le jeune Jurassien avait d’ailleurs réalisé son premier coup d’éclat sous l’étendard des Verdets en se classant dans l’UBS Challenge en décembre 2024 : « Après l’an dernier dans le Medium Tour, je voulais au moins pouvoir refaire cela. Être sélectionné par le chef d’équipe dans le Big Tour, c’est un palier de plus. Le challenge sera d’essayer de se qualifier pour le Grand Prix. L’année dernière, nous étions là pour prendre du plaisir et de l’expérience, cette année, j’aimerais être compétitif. Quant au circuit Coupe du monde, on ne va pas se prendre la tête avec ça, nous ne voulons pas gâcher tout ce que nous avons construit jusqu’à présent », souligne Gaëtan Joliat. Une ascension rapide, un avenir tout tracé, mais un cheminement réfléchi et construit.
Elisa Oltra et Lena Vulliamy
Cet article est paru en p. 29-31 du n° de décembre-janvier.
Une ascension bien maîtrisée
Après un peu plus d’un an de collaboration, le bilan est plus que positif pour le trio. « Les chevaux ont envie de donner à Gaëtan. On a vu une belle progression cette année, notre but est l’excellence, mais on garde les pieds sur terre. On a vraiment pris notre temps pour que Gaëtan se mette avec nos chevaux, sans brûler les étapes. Ça a tout de suite matché avec Just Special VK, qui est très guerrière, mais avec Chelsea, il faut construire une relation de confiance très solide et être copain avec lui. On gagne du temps en en prenant », expliquent en cœur père et fille.
Pas de quoi donner le tournis ou mettre la pression à leur protégé. « Pour faire partie des meilleurs, on doit être dans l’excellence », statue le vice-champion de Suisse. Et si l’ascension fut rapide, elle s’est aussi faite progressivement avec d’abord plusieurs concours de niveaux inférieurs, puis du 2* et du national et enfin les CSIO 3* et 4*. Dans cette continuité, il y eut la victoire dans la Coupe des Nations de Samorin, St-Gall, où le Jurassien de 20 ans (19 à l’époque !) était sans-faute dans le Grand Prix, puis la finale d’Avenches, qui fut un triomphe, et, enfin, le premier CSIO 5* à St-Tropez-Gassin ainsi qu’une première sélection pour une étape de Coupe du monde à Oslo, ponctuée d’une 10e place dans le Grand Prix.
« Gaëtan doit encore s’endurcir et les chevaux doivent aussi reprendre le rythme, car il y a un monde entre les 5* et le reste. Les exigences sont énormes, mais on a vu nos manquements et on sait sur quoi travailler », expliquent de concert les mécènes neuchâtelois.












