Omar Al Marzouqi, repéré à douze ans pour les JO ! (1/2)
Aux rênes de l’étalon Enjoy de la Mûre, Omar Abdul Aziz Al Marzouqi fait peu à peu une élégante place sur la scène internationale. Étonnant 21e des Jeux olympiques dans les parcs du Château de Versailles, victorieux des Sires of the World (Mondial des étalons) à Lanaken, 2e de la Coupe des Nations d’Abou Dabi et 23e de la Finale Coupe du monde de Bâle, il porte haut les couleurs de son pays – au sens propre comme au figuré, lui qui était porte-drapeau à Paris. Avant cela, le fin cavalier émirati avait décroché deux médailles aux Jeux asiatiques en 2023 ainsi que l’argent aux JO de la jeunesse de Buenos Aires en 2018. Grâce à Al Shira’aa, les écuries de la Cheikha Fatima Bint Hazza Bin Zayed Al Nahyan, le jeune prodige peut viser les étoiles. Cette dernière lui a offert une formation complète d’homme de cheval et lui met plusieurs cracks à disposition. Entre deux éclats de rire, le cavalier de 22 ans se confie sur son parcours, son sublime selle français et ses valeurs.
Omar, comment avez-vous débuté dans le milieu équestre ?
Mon père est cavalier et coach, il a monté les Jeux asiatiques et il entraîne jusqu’au plus haut niveau. Il a même été le chef d’équipe des Émirats arabes unis. J’ai commencé à monter à l’âge de 3 ou 4 ans, mais à poney, rien de sérieux. Nous nous sommes ensuite établis dans un centre équestre à Abou Dabi en 2009 et c’est là que j’ai officiellement commencé à m’entraîner. J’ai fait mes premières compétitions en 2011, à l’âge de 9 ans, et mon premier international en 2015 en Grande-Bretagne.
Pourquoi la Grande-Bretagne ?
Nous étions là-bas pour l’été, dans une écurie qui appartient à Al Shira’aa.
Avez-vous étudié en parallèle ?
Oui, j’ai fait un Bachelor en philosophie et sociologie à l’Université de la Sorbonne à Abou Dabi et j’ai été diplômé l’an dernier ; j’ai poursuivi avec un Master.
Comment avez-vous conjugué les deux ?
Je ne sais pas (rires). Mais l’année dernière, avec les Jeux olympiques, j’ai pu suivre une partie des cours en ligne. Je faisais des allers-retours entre Abou Dabi pour les examens et l’Europe pour les concours. Honnêtement, c’était difficile. Habituellement, je suis à Abou Dabi d’octobre à avril et cinq mois en Europe de mai à septembre.
Quand avez-vous décidé de devenir cavalier professionnel ?
C’est une question que mon père m’a posée quand j’avais peut-être quatorze ou quinze ans. Il m’a demandé : « Veux-tu faire ça de manière professionnelle ou juste pour le plaisir ? » J’ai choisi la première option et il m’a prévenu que ce serait beaucoup de travail et d’investissement. Mais il m’a aussi dit que les études étaient tout autant importantes. Pour mes parents, je devais m’investir autant dans le sport que dans ma formation. Je suis heureux d’avoir pris cette décision.
Était-ce aussi important pour vous d’avoir une formation ?
De nos jours, je pense que c’est très important. Je poursuis mes études parce que j’aime avoir davantage de connaissances, et parce que je rencontre des personnes de mon âge, mais de différentes nationalités, des Français, des Européens, des Asiatiques…
Donc vous parlez français !
Je le parle, mais ce n’est pas génial (en français parfait dans la discussion, ndlr) !
Comment avez-vous fait la connaissance d’Enjoy de la Mûre (SF, par Vigo Cécé) ?
Je l’ai rencontré en septembre 2023 en Espagne. William (Funnell, qui coache les Émiratis, ndlr) m’avait montré une vidéo et j’ai voulu l’essayer. Il m’a plu, j’ai aimé la sensation sur le saut. William l’a aimé aussi, le vétérinaire a donné son aval et Cheikha Fatima bint Hazza bin Zayed Al Nahyan m’a dit : « Si tu l’aimes, vas-y ! » On l’a acheté et on a attendu deux mois avant de le sortir en concours en Grande-Bretagne, pour vraiment apprendre à le connaître.
Comment le décrivez-vous ?
C’est le meilleur ! Lors de notre premier concours, il s’est classé 4e du Grand Prix 2*. Et le deuxième concours, il l’a gagné. Il est très gentil avec les humains et il est toujours plein d’énergie, il adore les balades, alors je me promène souvent avec lui. Et puis il aime sauter. Il est différent des autres chevaux. Quand je l’ai acheté, il n’avait fait qu’un Grand Prix 5* (avec Eduardo Alvarez Aznar, ndlr) et on a progressé ensemble. Je lui faisais totalement confiance pour les Jeux olympiques. Mais je crois que cette confiance est mutuelle. On matche.
Ressentez-vous l’affection du public pour votre couple ?
Les gens aiment Enjoy pour son caractère en piste, toujours en train de faire le show. Il se bat pour faire de son mieux. J’étais très content d’être en finale, c’était énorme.
Vous n’aviez que 21 ans à Paris. Avez-vous réalisé ce qui vous est arrivé ?
Pas encore je crois. Paris était exceptionnel. Il y avait cela en plus de mon Bachelor à terminer, de quoi me rendre fou. Mais je ne suis pas quelqu’un de stressé. Je suis toujours calme, souriant, en train de manger (rires). Nous sommes allés au Jeux sans pression, mes propriétaires m’ont dit que dans tous les cas, ils seraient fiers. C’étaient nos premiers Jeux en tant que nation, on grandit dans le sport. Quand j’ai fini la qualificative sans faute, plus de cinquante Émiratis étaient là, mon père était en larmes, mon coach était heureux. Je n’y ai pas cru jusqu’à un mois après, en revisionnant les vidéos. Là je me suis dit « ok, j’étais sans faute aux Jeux olympiques ». Je n’avais pas imaginé ça. J’ai toujours voulu participer aux JO mais je ne me mettais pas de pression. C’est arrivé pas à pas.
Qu’avez-vous pensé de l’organisation des JO ?
C’était une belle expérience, tout était parfait et bien organisé pour les chevaux.
Vous parlez beaucoup de votre père. Quelle est votre relation ?
C’est un ami. Il est toujours présent lors des grosses échéances ou les Coupes des Nations. Je suis content quand il est là. Ma maman, qui n’a jamais monté à cheval, est souvent là aussi. Elle était aux Jeux olympiques. Je suis très reconnaissant de les avoir. Il ne se passe pas un jour sans que l’on ne se téléphone.
Avez-vous des frères et sœurs ?
Oui, nous sommes cinq et tout le monde monte à cheval. L’aînée fait du dressage, les autres du saut. Ma sœur cadette était championne nationale l’an dernier, mon frère de quatorze ans a commencé sa saison junior et le plus jeune monte à poney.
Le but serait donc d’en faire une équipe !
C’est clair (rires) !
Propos recueillis par Lena Vulliamy et Elisa Oltra
Cette interview est parue en p. 27 à 29 du numéro de juillet. Toute reproduction des textes et photos, même partielle, est interdite sans l’autorisation de l’éditeur.